Initiation à l’enquête ethnographique. Ville et apprentissage de la citoyenneté

  • Alexandra Bidet, chargée de recherche au CNRS ( Hors EHESS )
  • Manuel Boutet, maître de conférences à l’Université de Nice Sophia-Antipolis ( Hors EHESS )
  • Carole Gayet-Viaud, chargée de recherche au CNRS ( Hors EHESS )
  • Erwan Le Méner, chercheur à l’Observatoire du Samusocial de Paris ( Hors EHESS )
  • Page officielle de l’atelier : http://enseignements-2015.ehess.fr/2015/ue/555/
  • Présentation :

    Ce séminaire vise à initier les étudiants à l’enquête ethnographique, ses étapes, ses méthodes et ses aspects les plus concrets, à travers la participation à une enquête collective en train de se faire. Cette enquête s’inscrit dans le cadre d’un projet financé par le Labex Tepsis : « L’expérience citoyenne au prisme de la coprésence urbaine ». Elle cherche à documenter ce qu’apporte à la compréhension de « l’expérience citoyenne » l’étude ethnographique des interactions entre inconnus en ville. Dans quelle mesure ces interactions, incessantes et variées, participent-elles au quotidien à ce que l’on désigne classiquement comme la « formation de l’opinion » ? Une formation de l’opinion qui s’étend en deçà et au-delà de la formation des mobilisations et des « problèmes publics » stricto sensu.

    Les exercices ethnographiques proposés cette année auront pour terrain d’enquête les apprentissages et les épreuves « citoyennes », ou politiques au sens large, associées au passage à l’état de parent. Prendre l’enfant comme centre de perspective, c’est en effet aussi porter un regard neuf sur les apprentissages citoyens des parents. À quoi la présence d’un enfant rend-elle sensible dans la rue ou les lieux publics ? Comment modifie-t-elle ce qui compte, sollicite ou fait agir ? Quelles expériences les parents cherchent-ils à faire faire ou à éviter à leurs enfants ? Comment, plus largement, sont-ils amenés à trier parmi les faits et les gestes hérités ? Ces questions indicatives suggèrent que l’enquête ethnographique peut prendre au sérieux l’idée que la socialisation se déroule tout au long de la vie et que l’apprentissage de la citoyenneté ne se limite pas aux espaces de socialisation institutionnels, l’école notamment.

ATELIER ENGAGEMENTS

ESPACES PUBLICS URBAINS ET ETHNOGRAPHIE DE LA CITOYENNETÉ

  • Alexandra Bidet, chargée de recherche au CNRS
  • Manuel Boutet, maître de conférences à l’Université de Nice Sophia-Antipolis
  • Frédérique Chave, CNAF
  • Carole Gayet-Viaud, chargée de recherche au CNRS
  • Erwan Le Méner, agrégé de sciences sociales, responsable des sciences sociales à l’Observatoire du Samu social
  • Page officielle de l’atelier : http://www.ehess.fr/fr/enseignement/enseignements/2014/ue/954/
  • Présentation

    Vendredi de 10 h à 12 h (ENS, salle de réunion du Département de Sciences sociales, Bât. B., 2e étage, Campus Paris-Jourdan, 48 bd Jourdan 75014 Paris), du 17 octobre 2014 au 16 janvier 2015. Le séminaire se déroulera en salle 10 les 17 et 24 octobre ; en salle 8 le 5 décembre

    Ce nouvel atelier prolonge le séminaire « Ethnographie des engagements : travail, bénévolat, jeu, citoyenneté », qui s’organisait autour de deux questions : de quelle ethnographie avons-nous besoin pour documenter la portée morale et politique de nos engagements les plus ordinaires ? De quels engagements notre quotidien est-il porteur, et dans quelles conditions ?

    Durant l’année 2014/2015, on initiera, à partir d’un bilan de ce travail et des développements les plus récents de la méthode ethnographique, une enquête collective sur les façons dont les personnes, dans les espaces publics urbains, au gré de leurs activités professionnelles ou associatives, ou comme proche ou simple passant « y mettent du leur », selon l’expression familière. Il s’agira ainsi de documenter ce à quoi elles tiennent, mais aussi de discuter la façon dont leurs initiatives s’orientent vers un horizon moral ou politique.

    L’atelier comprendra 12 séances de 2 heures, durant lesquelles nous commencerons par réfléchir aux façons de découvrir ce qui concerne les personnes, en partant de l’hypothèse que ces concernements se sont formés en lien avec ce qui les a affectées ou marquées au cours de leur trajectoire, et qu’ils sont observables à travers ce qu’elles cherchent aujourd’hui à faire valoir ou à développer dans certains contextes d’activité. Nous ferons porter l’enquête sur les moments saillants, la façon dont on y a répondu, et les traces laissées par ces expériences.
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ARCHIVES

Les compte-rendus du séminaire “Ethnographie des engagements”

  • 1ère année : http://www.ehess.fr/fr/enseignement/enseignements/2011/ue/740/

    Au cours de cette première année, ont été examinées différentes conceptions possibles d’une ethnographie des engagements. Nous nous sommes demandés en quoi l’ethnographie peut apparaître nécessaire pour documenter les formes d’engagement à l’œuvre dans les pratiques les plus ordinaires, relevant notamment du travail, du bénévolat, du jeu ou de la citoyenneté.

    Après avoir fait le point sur les récentes synthèses disponibles sur l’engagement public de professionnels, la sociologie de l’engagement militant, et le travail militant, nous avons explicité le parti pris du séminaire : celui d’une approche plus large et générique de l’engagement. Il s’agit de saisir l’engagement de façon transversale, comme le fait de se lier volontairement, ce qui va souvent de pair avec une attention aux conséquences de ce pari, y « mettre du sien », qui affecte et transforme indissociablement les personnes et leur milieu.

    Qu’est-ce qu’ethnographier un engagement ? Parmi les apports de l’ethnographie, nous avons plus particulièrement examiné, à partir de l’analyse de deux terrains très différents (la pratique du jeu vidéo et la citoyenneté) sa capacité à documenter la part de passivité de nos engagements, leur caractère d’« engagements de circonstance », et leur inscription dans une durée que trame la « répétition » de gestes qui « valent la peine ». A contrario, nous nous sommes aussi penchés sur la lignée de travaux menés sur la « compétence politique », qui tend à évaluer l’engagement à l’aune d’un modèle qui privilégie, avec les figures de l’électeur ou du militant, les dimensions de choix, d’intensité, de délibération, etc.

    Le séminaire s’est poursuivi par l’examen, à partir d’articles et d’exposés de recherches en cours, de formes d’engagement situés à distance, tout à la fois, des espaces classiquement dévolus au « politique », à la « participation citoyenne », ou à l’engagement militant, et des milieux d’interconnaissance. Nous avons ainsi privilégié des formes d’engagement quasi occasionnel, hors de dispositifs apprêtés et d’injonctions, dans des lieux publics, comme la rue, où se côtoient des inconnus. Nous avons exploré les façons de documenter et de qualifier l’éventuelle portée morale et politique de ces interventions de passants dans l’espace public, où s’observent, de façon fugace et transitoire, l’esquisse d’intérêts partagés et un souci du commun. Cela nous a amenés à thématiser une ethnographie de la citoyenneté qui ne se limite pas à l’étude de milieux d’interconnaissance.

    Après avoir exploré, à travers les disputes de politesse, l’urgence médicale, et le signalement de sans-abri, des formes d’engagement prenant place dans la rue et s’appuyant sur ses rencontres, nous avons interrogé en retour le travail de l’ethnographe sur ces terrains précis. De quelle nature est l’engagement de l’ethnographe qui s’efforce de développer des façons de conduire l’enquête prenant au sérieux ce à quoi les personnes tiennent, et la manière dont elles le font valoir dans les situations ? Pour interroger la portée politique de l’ethnographie, nous avons mobilisé deux articles où Isaac Joseph thématise les enjeux politiques de son travail, et les avons mis en regard avec les formes d’engagement de l’ethnographe dans une enquête de longue durée actuellement menée sur une famille sans logement.

    Le séminaire s’est terminé, avant la séance conclusive consacrée aux travaux des étudiants, par une séance sur la question des publics de l’engagement : il s’est agi de se demander si l’on pouvait caractériser des « écologies » ou des « milieux » de l’engagement, en examinant des travaux empiriques récents qui relient les expériences les plus personnelles et sensibles que l’on peut faire d’un environnement aux dynamiques par lesquelles un concernement devient public. Cela fut l’occasion de préciser ce qu’est un « public », et l’apport décisif de la tradition pragmatiste pour leur étude.
  • 2de année : http://www.ehess.fr/fr/enseignement/enseignements/2012/ue/772/

    Au cours de cette deuxième année, nous avons poursuivi nos investigations visant à préciser les caractéristiques d’une ethnographie qui serait à même de documenter la portée morale et politique des engagements même les plus ordinaires. Le pari a consisté à être attentifs à la dimension la plus générique, la plus quotidienne et ordinaire de l’engagement, en même temps qu’à sa spécificité comme passage à l’acte, comme intervention, et à ses enjeux démocratiques – de participation à la gestion des affaires communes – dans des activités qui ne relèvent pas des espaces classiquement dévolus au politique. Que veut dire s’engager en citoyen en dehors de ces lieux ? Qu’est-ce qui fait le caractère citoyen d’un acte ? Plus largement, nous nous sommes interrogés sur ce qui intervient dans un engagement, sur le point auquel nous sommes engagés, avec qui, et avec quoi.

    Peut-on documenter l’indifférence ordinaire sans qu’elle s’épuise dans le conformisme social ou un désintérêt général pour le politique ? L’apport pragmatiste consiste à s’intéresser aux dynamiques d’engagement, à l’émergence d’un « intérêt pour » et à sa transformation en intervention en prenant en considération des dispositifs d’entraînement, au double sens du terme, c’est-à-dire aux prises, occasions, sollicitations, qui permettent de temps à autre des formes d’intervention. On découvre ainsi des « milieux », ou des « écologies » de l’engagement, qui ne se limitent pas à la figure des « collectifs d’engagement ».

    L’accent a été plus particulièrement mis sur l’examen de travaux récents. Après un retour sur la notion de « compétence politique », nous avons contrasté différents cas de « passants concernés » et confronté leur forme d’« engagement en passant » à la curiosité du lecteur de journaux, à des formes de participation incongrues à des assemblées participatives aux États-Unis, au sentiment d’implication pour les victimes d’attentats, ou encore à la dynamique d’engagement des agents à Hollywood.